Avis du vol entre Mulhouse / Bâle et Zurich en classe Economique avec Super Constellation Flyers

Bonjour à tous,
Un FR un peu spécial aujourd'hui, dédicacé spécialement à Alcam, celui de mon vol sur l'un des deux derniers Lockeed Super Constellation en état de vol. Celui ci est basé à Bâle, le second est basé à Illawarra en Australie. La prochaine fois peut être…
Cet avion, HB-RSC est opéré par la Super Constellation Flyers Association, un groupe d'enthousiastes dont je fais partie, heureusement soutenu par quelques sponsors généreux qui permettent d'avoir ce bijou en parfait état de vol.
Le vol SCFA 1011 devait décoller, comme le numéro de vol l'indique le 11 Octobre 2014.
La météo pourrie reportera le vol au lendemain 12 Octobre.
Le tableau des départs de l'aéroport de Bâle a comme une sorte d'intrus au milieu des grandes majors européennes et des low cost désormais classiques vers les grands aéroports européens. Mon vol n'a pas de logo compagnie et parcours assez étonnant: 1h30 de vol pour faire 93 kilomètres !

En fait le vol SCF1011 va faire un grand détour pour survoler une bonne partie de la Suisse, notamment ses lacs pour atterir à Zurich, où le Super Constellation va finir sa saison de vol estivale et profiter d'un repos bien mérité au chaud dans un hangar.
La vieille dame (cet avion a été construit en 1956) attend tranquillement au stand les quelques fanas comme moi de celui que je considère comme le plus bel avion au monde.

Après avoir franchi une bonne dizaine de fois la frontière (la séparation entre la partie française et la partie suisse a disparu dans le terminal, il suffit de franchir une ligne au sol et on passe d'un pays à l'autre), je passe les contrôles de sécurité comme tout le monde, et on se retrouve dans le terminal ce qui permet de faire un peu de spotting.
L'aéroport est dominé par Easyjet, mais pas mal de compagnies assez exotiques y atterissent. Comme ce 737 Air Bucharest qui ne fait pas très envie

ou un ATR de Farnair

un ATP de West Atlantic, une compagnie Cargo

Et l'A320 d'Air Berlin à destination de Catane pour finir la séance spotting. C'est d'ailleurs assez étonnant de prendre ce vol en Constellation au milieu des touristes et des voyageurs d'affaires, on se sent un peu décalé.

Notre coucou a déjà 1h de retard, et ça ne va pas s'arranger car la procédure de départ est un peu spéciale: l'avion fait un tour de piste à vide pour chauffer les moteurs avant d'embarquer ses passagers. Certes on n'est pas là pour la ponctualité, mais je commence à l'inquiéter pour mon vol retour vers Paris qui n'est que dans quelques heures. Ouf, ça y est, on est appelés à la porte. Départ en paxbus (pas trop serrés, on n'est qu'une vingtaine de passagers) pour 1h30 de bonheur.

Le confort est assez spartiate, pas d'IFE, pas de jolie hôtesse, pas de repas. Déception ;)
Le flight routing temps réel est remplacé par une grande carte accrochée à la paroi sur laquelle la route (prévisionnelle) est tracée. Pas très facile à suivre, surtout que je ne connais pas la Suisse (d'ailleurs si les lecteurs suisses repèrent une erreur de positionnement qu'ils me le fassent savoir je corrigerai)

L'avantage c'est qu'on pourra se balader durant tout le vol sur l'ensemble des hublots sans déranger personne.
Le pushback nous amène sur le taxiway, au milieu duquel on allumera les moteurs. Les boeings passent à côté, j'imagine la surprise des passagers de voir ressurgir notre ancètre

Avant la remise en route des moteurs avec un magnifique panache de fumée à chaque fois (désolé de l'intérieur on ne voit pas bien: je publie donc cette vidéo que je n'ai pas filmée personnellement mais qui montre parfaitement la séquence de démarrage)

Puis le décollage piste 16. Je n'ai pas coupé la vidéo de 5:53 désolé pour les longueurs, mais j'ai laissé le bruit extraordinaire des Wright Cyclone même si l'avion ne décolle plus à plein régime pour économiser les moteurs.
Vous pouvez apercevoir les flammes habituelles des moteurs à piston à 2:40 quand il décolle. Impossible de comparer les vibrations, le bruit des moteurs du constellation avec un décollage classique…c'est beaucoup moins puissant mais tellement plus impressionnant qu'aun jet car c'est tout l'avion qui entre en résonance avec ses moteurs.

Les flammes d'échappement en gros plan. J'avais prévenu ma femme de ne pas s'inquiéter quand elle verrait des flammes; pas sûr que cela ait suffi à la rassurer…

Décollage sud ouest direction Neuchâtel. On va survoler toute la suisse entre 1000 et 3000 pieds d'altitude. L'occasion de compter les vaches et les sapins dans le parc naturel régional de Thal pour commencer

Un temps nuageux en ce dimanche d'Octobre, je crains qu'on ne voie pas grand chose

Même si les sommets alpins se détachent dans un joli dégradé de gris

mais tout à coup, les nuages se percent comme ici sur le lac de Thun

Offrant une jolie vue sur le chateau de Spiez, au bord du lac de Thun

Ou l'aérodrome de Meiringen

Petit tour en cabine qui est accessible pendant tout le vol à l'exception des phases de décollage et d'atterrissage. Les pilotes tous deux d'anciens Swissair (Ron de Jong en capitaine et Ernst Frei qui fait pour une fois office de First Officer) ont quelques dizaines de milliers d'heures de vol à eux deux. Ils font partie des 12 pilotes encore qualifiés sur Super Constellation. A propos d'heures, il faut environ 5000 heures de maintenance l'hiver pour faire voler cet avion une cinquantaine d'heures l'été.

L'ingénieur de bord, Rolf Harlacher. Comme c'est écrit avec humour, probablement la personne la plus importante du vol car il règle en permanence les quatre moteurs, et notamment il les nourrit d'huile. L'avion aura consommé près de 500 kgs d'huile durant ce vol

Le cockpit dispose de la quasi totalité des instruments d'origine même si tous les instruments de navigation modernes ont évidemment été ajoutés. Malgré l'âge de l'avion, on se sent parfaitement en sécurité, l'équipage respire professionnalisme et maîtrise totale de la situation.

En plus de vibrer en permanence au rythme du moteur et du pas des hélices, cet avion a une odeur incroyable: un mélange de kérosène et d'huile qu'on ne retrouve plus dans nos Airbus ou Boeing. Une expérience de vol ahurissante: tout y est sensation.
Retour aux hublots : le lac de Brienz (Brienzersee), un petit air de paradis vu du ciel avec son eau turquoise

D'ailleurs c'est le moment qu'a choisi l'avion pour nous agrémenter de quelques turbulences, j'ai failli me retrouver la tête au plafond… A force de zigzaguer à basse altitude au fond des vallées, on prend plus de risques qu'à 33 000 pieds.
Car on ne vole maintenant qu'à 800 pieds soit 300 mètres environ du sol, et à 180 knots soit 300 km/h

On a quand même très vite délacé les ceintures de sécurité pour se jeter sur les hublots
Ce qui permet de profiter du grand spectacle de la verte campagne suisse sur fond de montagnes

Un virage à gauche pour admirer ce très beau paysage sur (je crois) le lac de Zug au premier plan et celui de Luzern derrière. Une photo que j'adore pour le reflet de la carlingue sur le moteur 1.

Survol du lac de Halwill (Halwillersee), on s'approche de l'arrivée

Dernier petit tour en cabine. C'est trop tentant.

Ca bouge quand même encore pas mal

On va éviter de vider les réservoirs

La technologie moderne nous indique qu'on est au dessus de Aarau, dernier virage à droite pour s'aligner sur la piste 14 de Zurich.

Et pour finir l'atterrissage à Zurich, attendu par les spotters locaux qui ne manqueraient pour rien au monde le dernier atterrissage du Constellation. Là aussi, j'ai laissé la vidéo sans ajouter de musique, histoire d'apprécier le toucher des trains à 1:41 et le crissement des freins à 2:05.

Retour au 21ème siècle, au parking près des Airbus que je vais bientôt retrouver (A320 Air France vers Paris dans moins de 2 heures)

A très bientôt, j'espère