J'ai vécu à peine plus de deux ans en Chine, mais les visas de résident y étant délivrés et renouvelés pour un an, j'ai pu aller et venir sans contrainte pendant trois ans.

Je me suis un peu creusé la tête pour trouver comment aller fêter dignement autour d'un dîner avec des amis de Shanghai l'expiration imminente de mon visa chinois. Un vol direct ? Trop facile, donc pas drôle. Le résultat de mes cogitations n'avait que quatre segments aériens, mais dix-huit ruptures de charge, y compris les trajets en taxi, métro, et ferry.
Pour ceux qui ont séché mes cours précédents de géographie taïwanaise, voici une carte générale pour les aider à suivre (merci gcmap.com). Je rappelle aussi que LZN et KNH sont des îles taïwanaises, même si ce n'est pas évident à première vue, et même si la propagande chinoise continue d'affirmer que ce périple était intégralement en Chine.

Pour ceux qui ont aussi séché mes cours d'histoire, je rappelle que l'ouverture de liaisons directes Taïwan ? Chine (sans passer par Hong-Kong) a commencé en 2001 par trois liaisons en ferry Kinmen-Xiamen, Kinmen-Quanzhou et Nangan-Fuzhou, dans l'ordre décroissant de trafic. Deux aller-retour quotidiens seulement au départ de Nangan (LZN), car l'archipel de Matsu est très peu peuplé et noyé dans le brouillard au printemps. C'était bien sûr une raison supplémentaire pour l'emprunter.
Rares sont les étrangers à Taipei qui peuvent parler de déjà vu au sujet d'un vol TSA-LZN, et d'ailleurs mes collègues taïwanais ont renoncé à comprendre mon sens des priorités touristiques dans leur pays. C'est en effet la deuxième fois que j'emprunte ce vol. Il est très matinal, mais je n'avais pas le choix, car l'avion suivant serait arrivé trop tard pour le ferry du matin, et à dire vrai, c'était plus le ferry que l'avion qui m'intéressait dans le premier segment de ce week-end. Le taxi pour arriver à TSA était donc incontournable, à moins de faire la moitié du trajet à pied pour aller prendre le premier métro sur la ligne directe.
Ce taxi avait une particularité intéressante ? j'ai vu l'identique à Kaohsiung : si vous regardez bien, à gauche du rétroviseur, il y a l'écran minuscule d'une mini-caméra orientée vers l'avant. Elle enregistre en continu le trafic devant : en cas d'accident, elle facilitera l'identification des responsabilités.

Arrivée au terminal domestique de TSA : je suis sur le premier vol d'Uni-Air, et il est complet.

Uni-Air a des bornes libre-service flambant-neuves, avec du personnel pour aider les passagers qui découvrent la chose (bien sûr cela, cela existe déjà à TPE). Je n'ai malheureusement pas testé avec ma carte de séjour : l'employée m'a demandé si j'avais un passeport (manifestement non reconnu par les bornes automatiques), et je me suis enregistré à l'ancienne au comptoir.

Grâce à FR, vous connaissez déjà par c'oeur le moindre recoin de la salle d'embarquement de TSA côté domestique, que voici :

Elément indispensable d'un récit de l'An II de Flight-Report, l'inspection des WC, qui sont impeccables (le contraire m'aurait étonné), et où on a pensé au fait que les enfants aussi se lavent les mains.


Dans mon dos, vous savez qu'il y a deux PC en libre service, mais les photographier avec la page d'accueil, ça fait très daté 2011, autant dire carrément has-been, et je crée l'événement en vous faisant découvrir en avant première LE GADGET FLIGHT-REPORT !

Imprimé ici sur du papier 175 g/m² aux couleurs approximativement corporate (j'ai fait avec les moyens du bord, ou plutôt du bureau), le PDF sera disponible en téléchargement pour 5 EUR dès que j'aurai bouclé de délicates négociations de partage de copyright avec les administrateurs de FR. J'envisage de lancer le produit avec 10 000 téléchargements gratuits, mais après, ma fortune sera assurée.
Le même, dans la partie publique, avec la liste des premiers vols à l'embarquement.

Uni-Air s'est aussi équipé à la porte d'embarquement d'un gabarit à bagage à main tout neuf. Il y a deux repères, car la place disponible à bord des MD90 est plus généreuse qu'à bord de Dash-8. Mais n'allez pas vous imaginer un accueil à la RYR : c'est une fois qu'une jeune passagère se fut installée à sa place que l'hôtesse lui a dit que son sac à dos outrageusement hors gabarit devait être retiré de ses genoux (il ne tenait évidemment ni dans les coffres, ni sous le siège) et mis en soute au dernier moment, le tout effectué sans animosité.

L'avion était complet, et le PAXbus pour l'atteindre aussi.

Voici l'avion ? je ne suis pas le seul à l'immortaliser. Cela faisait une semaine qu'il faisait un temps pourri à Taipei, et cela ne s'était guère amélioré ce samedi matin : un crachin fort peu sympathique.

Avec cette visibilité au sol, plus le fait que la nuit venait de s'achever (car parler de soleil qui se lève, c'est assez optimiste dans ce genre de cas), le spotting est limité à cet ATR-72 de TransAsia Airways, stationné à proximité.

On monte à bord, avec un cliché pour les geeks immatriculophiles.

Et un autre pour ceux qui appris à se méfier de mes affirmations sur les types d'appareil dans lesquels que je prétends avoir embarqué.


A bord, c'est effectivement complet.

Un aperçu de la carte de sécurité, du magazine de vol et du pitch.

Dès le décollage, on pénètre dans la crasse, et il faut longtemps pour en sortir.

Ca ne se voit pas très bien sur la photo, mais comme on était juste aussi de la couche supérieure des nuages, on voit l'ombre de l'appareil (mon APN a eu du mal à mettre au point sur une ombre projetée sur de la vapeur d'eau).


Côté repas, vous savez qu'un vol intérieur taïwanais, c'est zéro nourriture solide et un verre café/thé/eau de qualité variable selon la compagnie. Le café d'Uni Air a cette particularité d'être correct, la concurrence locale ne pas en dire autant (sur d'autre lignes, bien sûr). Un peu de turbulences : cela ralentit le service, sans l'interrompre pour autant. Un bon point pour les PNC qui réussissent à servir tout le monde sans éclabousser un seul PAX.
L'appareil sort de la crasse à six minutes du posé des roues, alors que le train est déjà sorti et qu'on n'est plus très haut dessus de la mer qui est assez agitée. Désolé pour le cadrage, mais j'étais un peu visible de la PNC sur le jump seat arrière. Si vous comparez avec mon FR du même vol un mois plus tôt, vous comprendrez que la météo est moins sympathique.



Toucher des roues parfaitement à l'heure; le Dash-8 avale toute la piste pour ne s'arrêter qu'au bout, qui tombe quasiment à pic sur la mer.
Un coupe d'?il sur la cabine : à l'arrière côté gauche, il y a un rang 15 sans hublot côté gauche, en face de la minuscule kitchenette.

Mais pour autant, il y a quatre places de moins que vous ne le pensiez, car Uni-Air est superstitieuse, et il n'y a pas de rang 13. Et il n'y a pas non plus de rang 1 à gauche.

Pour le reste, c'est un Dash 8-300, quoi?

Le voici sur le tarmac de LZN, qui est moins encombré que celui de TSA (c'est une litote)

Je prends un taxi pour aller au port de Fu'ao (à quelques kilomètres) : je suis largement dans les temps sauf que?
Sauf que le chauffeur me dit ah, mais en hiver, il n'y a un ferry que l'après-midi, le ferry du matin ne circulera à nouveau qu'en mars !. Changement de programme, je lui fait faire demi-tour pour aller à Jieshou (la toute petite agglomération que vous voyez dans la dernière photo avant l'atterrissage) louer un scooter pour me balader dans la matinée. Il m'amène à un gîte qui a quelques scooters à louer pour ses clients. La propriétaire est très sympa; OK pour un scooter à 400 TWD (tarif standard à Taïwan), non, pas besoin de pièce d'identité. Je lui explique ma situation et je m'installe dans le hall pour changer ma réservation d'avion, car évidemment c'est mort pour le vol FOC-SHA en début d'après-midi.
C'est l'occasion de vous dévoiler un de mes secrets d'ex-FRiste en Chine : acheter des billets d'avion en Chine, c'est un jeu d'enfant pour un étranger lambda grâce à deux agences chinoises en ligne dont je ne suis pas le seul à témoigner de l'excellence : ctrip.com et elong.net. Sites internet bilingues bien conçus, comparateurs de prix, paiement par carte de crédit étrangère, hotline gratuite en Chine qui répond dans les 30 secondes dans un anglais irréprochable, qui vous appelle spontanément sur votre portable étranger (taïwanais) dans l'heure qui suit si vous avez fait deux réservations incompatibles, customisation par e-mail d'un package standard, changement ou annulation de réservation d'avion ou d'hôtel, j'ai tout testé pour vous et le résultat est nickel-chrome : zéro-virgule-zéro défaut. Ne pas s'inquiéter du numéro de portable chinois à fournir : un numéro bidon peut faire l'affaire. Une fois arrivé en Chine, une carte SIM s'achète pour dix euros dans les kiosques à journaux, et il suffit d'appeler la hotline gratuite pour les informer du nouveau numéro (ça aussi, je l'ai testé, et ils l'ont bien utilisé ensuite). Ces deux agences se développent à l'international, et le jour où elles atteindront vraiment l'Europe, je ne donne pas cher de la peau de certains voyagistes français.
D'ailleurs, initialement, j'avais réservé un vol SHA-XMN partant presque deux heures plus tard. Le couvre-feu étant très tôt à KNH, cela impliquait une réelle prise de risque compte-tenu de la médiocre ponctualité des vols intérieurs chinois, et ce n'était tout compte fait pas une mauvaise nouvelle de recevoir ce courriel de l'agence de voyage.

Vol annulé et reporté sur un autre vol de HO, partant deux heures plus tôt au départ de PVG, ou annulation sans frais et réservation d'un autre vol ? A la réflexion, repartir de PVG me permettait d'améliorer (= compliquer) sensiblement mon itinéraire : aucun vol ne repartait plus du même aéroport, et cela me permettait d'ajouter le Maglev et l'autre ferry Xiamen ? Kinmen à mon tableau de chasse.
Mais ça, c'était il y a un mois. On est le jour J et j'appelle la hotline de Ctrip. J'avais payé les billets avec ma Visa française, mais là peut-être parce que c'est du dernier moment, il demandent une carte de crédit chinoise que je n'ai pas. Il faut appeler la hotline de Xiamen Airlines pour bloquer une place jusqu'à H-90' et payer les 150 RMB de différence en cash sur place. Ca à l'air compliqué, mais en fait, cela se passe très bien.
Et quand je relève mon nez de mon ordinateur (+ clé 3G + Skype), la propriétaire du gîte qui elle aussi s'était mise sur internet me dit : Dites, vous savez qu'il n'y a pas de ferry du tout aujourd'hui ?.

Vous m'attendiez au virage, car vous l'aviez tous lu dans ma photo de titre de ce FR, mais moi, je le découvre à 8h58 : en raison de l'état de la mer, les services du Taima (le ferry Taïwan - Matsu) et le Xiaosantong (le ferry Matsu ? Chine) de et vers le port de Fu'ao sont tous les deux interrompus toute la journée du 7 janvier. Le port de Fu'ao, vous le connaissez, dominé par le slogan Dormons sur des hallebardes en attendant l'aube (= soyons prêts contre toute attaque nocturne des Chinois, soyons prêts à attaquer la Chine au petit matin). Le fait est que même derrière la digue, l'eau est agitée.

Mais pourtant, le ferry vers la Chine n'est pas une coque de noix.

O marins de l'archipel de Matsu, que n'avez-vous eu confiance en la divine protection de Matsu, Reine du ciel et protectrice des marins ?

O Matsu, toi à laquelle j'ai présenté mes respects en ton temple à ma dernière visite, que n'es tu venue à mon secours, que tes gardes ne t'ont averti de ma détresse de naufragé à Nangan, eux qui l'un voit à mille lieues, et l'autre entend à mille lieues ?

A dire vrai, Matsu n'a pas beaucoup de mérite à protéger les marins s'ils sont aussi petits joueurs, malgré le vent. Car ça soufflait fort ce jour là (déjà que par beau temps, ce n'est pas mal), et je me suis GELE sur le scooter (alors que j'avais une tenue d'hiver) pour aller dire ce que je pensais d'elle à Matsu dont j'attendais mieux.
Donc re-séance d'ordinateur + clé 3G + Skype pour appeler Ctrip et annuler mes billets FOC-SHA et PVG-XMN. Et appeler mes amis à Shanghai pour leur annoncer que c'était mort pour le dîner ensemble.
Le Quotidien de Matsu (un journal de quatre pages en une seule feuille pliée en deux ? il faut dire que l'actualité est maigre sur un territoire aussi exigu) titre que Toutes les liaisons maritimes et aériennes seront ouvertes pour le Nouvel An chinois, mais cela me fait une belle jambe, car c'est dans deux semaines. (Le titre de gauche est en style télégraphique, mais cela veut bien dire cela, en sept idéogrammes, pas un de plus. Ceux qui râlent contre le style SMS en France ne connaissent pas leur bonheur). Ils attendent 160 000 voyageurs, mais avant l'heure, ce n'est pas l'heure, et c'est encore l'hiver.

On résume : je suis sur une île de dix kilomètres carrés à une vingtaine de kilomètres de la Chine, tous les bateaux restent au port et ? scoop ? tous les avions vers Taipei sont complets.
La suite ? Vous la trouverez ici.
ouaw...! FR toujours aussi complet et très intéressant. Dans celui-ci, il y a même un peu de suspens!
Bon, je vais lire la suite, donc...
Merci pour ce FR :)
Quelle galère !
Merci pour ce FR! sympas l'avion en papier FR
Merci pour ce FR :)
Bonjour la galère, mais on attend la suite avec impatience :-)
marathon frappe très fort en ce début 2012...
Retour dimanche sur Taichung ?
Merci marathon pour ce FR à rallonge et bons vols/bonne route/bonne traversée
La suite la suite !!!
Nous auront donc prochainement droit à TR sur le MagLev ? Je risque de passer par la Chine en mars et je me tatais pour aller sur PVG histoire de reprendre le MagLev...
Il me tarde de lire la suite des aventures de marathon... :-)
Ah le premier avion papier FR, merci ! Quelle aventure !
Joli FR comme d'habitude Marathon :)
Très sympa l'avion, il va falloir commencer les négociations !
On attend la suite avec impatience,
A+
Des péripéties toujours aussi intéressantes !
+1 pour l'avion en papier.
Merci François,
Lol, vraiment désolé pour cette puasse, un vrai jour sans et pourtant votre enthousiasme était de mise dès le bon matin avec l'excellent avion en papier FR! J'espère que le coût de ces annulations de vols n'était pas trop important. En tout cas cela ne semble pas si simple de voyager par la bas dès que l'on s'aventure dans des routings exotiques.
@Leadership
Non, cela n'a pas coûté cher en annulations. FOC-SHA était à tarif réduit, ça m'a coûté à peu près 30 EUR, pour les deux autres vols, c'était 5% et 10%. La desserte de Matsu est notoirement peu fiable; cela faisait partie du risque. le plan B bricolé en temps réel, ça ne convient pas à tout le monde, mais j'aime aussi.
je fonctionne souvent en plan B, bricolé en temps réel...
Merci pour ce FR